Réflexions sur l’art du collage

Comme l’histoire le démontre, le collage en tant que pratique populaire existait bien avant  » l’invention  » des cubistes. Cependant, par définition, il n’aurait pas pu évoluer – puisque l’art populaire n’a pas pour objectif un but artistique – si les cubistes ne l’avaient  » redécouvert « . L’introduction du collage dans l’art au début du XXe siècle, va permettre aux artistes de développer cette technique dans tous les sens et contre-sens, et cela dans toutes les avant-gardes artistiques de ce siècle. Le collage a envahi toutes les formes d’expressions : même s’il ne fut qu’un médium pour les cubistes, un outil pour les futuristes, une révolte pour les dadaïstes, un principe pour les surréalistes.  » Ce n’est pas l’art qui s’inspire de la vie, mais la vie qui s’inspire de l’art « , disait Oscar Wilde. Fort de cette maxime, le montage-collage est avant tout le mode de fonctionnement même de la pensée du XXe siècle. Est-il pour autant une  » forme d’esthétisme de la discontinuité « , comme le dit Nicole Tuffeli, ou une expression constante ? N’échappe-t-il pas à tout contrôle et à toute définition, puisque essayer de le définir, c’est déjà essayer de le figer, lui qui dans sa propre ambiguïté est aussi l’art de figer objets et images. A l’heure du zapping universel, du montage et démontage permanent des images et du refus de la fixité, cette action de coller et de figer ne serait-elle devenue elle-même qu’un processus historique venu d’un autre âge ? À l’aube du XXIe siècle, l’art du collage n’est plus une révolution picturale, ni un mode d’expression de révolte, pas plus qu’il ne saurait être seulement un art de la citation ou de l’utilisation du rebut avec pour seul but d’interrompre le processus de désintégration des éléments récupérés, collés et figés. Comme dit Walker :  » L’œuvre d’art est le produit d’une faculté productrice innée de l’imagination et de la règle. Elle vient de l’abondance comme un trop plein et non en se battant les flancs à la recherche de formes de langage par manque de contenu « . Même si la composition dans le collage passe nécessairement par la décomposition de l’avantcollage, il ne s’agit plus pour le collagiste de coller pour coller, de fabriquer des rencontres iconoclastes pour le plaisir des rencontres iconoclastes, ni de figer pour figer, mais bien de composer. L’heure n’est plus de s’allonger sur la table de dissection chère à Lautréamont et aux surréalistes, ou à revenir à un état dada des choses, et le collage, qui a mis jadis la peinture au défi, doit trouver sa justification non dans sa propre modernité mais dans la créativité.

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