Le collagiste fait-il toujours, en quelque sorte, le même collage ?

Cette question renvoie à deux autres interrogations :

Quelle est la part de l’histoire personnelle de l’auteur, des éléments biographiques ?

Quelle est la part de l’inconscient ?

Selon Arrabal, d’une façon générale l’artiste crée en s’appuyant sur deux facteurs :

a) La mémoire : vie passée, sensibilité, intelligence, imagination.

b) Le hasard : La confusion, l’inattendu; ce que certains appellent l’originalité et d’autres, plus modestement, le génie.

JC Labrunie, qui avait soulevé cette question lors d’un colloque sur l’art du collage en 1996 organisé par le Collectif Amer (ex-Artcolle) affirmait : « le collage peut-être l’occasion d’un retour sur soi, que les circonstances personnelles, familiales, sociales qui entourent la création ne sont pas indifférentes et que le travail autour de la mémoire est important. »

Cela rejoindrait-il en écho la définition d’un style : un style c’est apprendre à bégayer dans sa propre langue disait Gilles Deleuze.

Ou cela serait-il dû au résultat de la même recherche non aboutie ?

Pour Hilda : « Quand on réussi quelque chose on essaie de le refaire, donc à ce moment-là il est possible de faire des collages dans le même esprit. Je pense qu’on passe par des périodes. Il y en a qui se spécialisent dans un thème, une matière, une couleur… mais s’agit-il toujours du même collage? A moins que ce ne soit une même obsession ? ».

Pour Lydie il s’agirait plutôt de répétition de sa propre trace : « Personnellement, j’adore quand je me rend compte qu’après moult essais, recherches et autre cheminements, se fixe une manière de faire, un petit truc propre bien à soi, qui finit par se coller dans quelques recoins même reculés des créations suivantes. Oui, une sorte de bégaiement ….J’ai aussi l’image de petites briques qui au fil du temps constituent l’édifice d’une sensibilité, d’une identité artistique. J’ai alors l’impression de (re)trouver des petites pépites de moi. Ce n’est donc pas refaire toujours le même collage.

Je veux bien être un Sisyphe mais alors je change de montagne à chaque fois, histoire de voir du paysage !

Pour Pascale ces « petites pépites de soi » à retrouver dans chacun de ses collages, ou de ses créations, quelques quelles soient, c’est rassurant peut-être, involontaire aussi parfois, comme de l’improvisation aboutie ou qui n’aboutit finalement qu’à créer son propre « style », un collage à son image et qui nous ressemblerait  dans sa multitude.

Mais alors, si nos collages ressemblent à nos propres multitudes, dans ce cas comment savoir lequel d’entre notre Je à créer tel ou tel collage, et comment ces collages auraient-ils pu se répéter en la même empreinte par autant de facette et d’acteur à la fois ?

L’art apporte plus de questions que de réponses, et si son but est de s‘élever nous ne savons toujours pas, même en haute altitude, qui est vraiment le véritable commandant de bord qui anime, tel l’Albatros de Baudelaire, ces ailes de géant qui ne l’empêchèrent pas – non pas de voler – mais de se questionner.

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