Le logo d’Artcolle
Il va sans dire que le logo d’Artcolle – omniprésent sur tous les sites du même nom et tous les livres édités par nos soins – est depuis longtemps dans l’art du collage le logo le plus connu au monde.
Son histoire, jusqu’ici tenue secrète, va vous faire plonger quelques instants dans l’univers impitoyable de l’art du collage et des collagistes, des artistes bulgares, et même vous évoquer quelque peu les affres subies par un certain responsable d’une glorieuse association.
Revenons dix sept années en arrière : le premier logo réalisé pour l’association Artcolle – du temps où celle-ci se nommait insidieusement Collectif Amer (1992-1999) fut réalisé par Bertrand Athouel. De couleur jaune & rouge, illustré par un grand A et des ondes d’art, il évoquait autant le collage que l’esprit des sixties.
Mais l’association changea de nom – plus précisément de l’arbre originel naquit une autre branche, (ceci étant une longue et autre histoire) et vécut durant quelques années sans logo.
En 2004 je commençais à travailler sur le projet de l’édition d’un ouvrage historique sur l’art du collage. Après deux années d’effort, à rassembler autour de moi 105 collagistes – dont les plus grands noms – pour collaborer à ce Grand Oeuvre, il fut enfin l’heure de passer à la phase active du projet.
Quand tout fut rassemblé, textes et reproductions, budget et choix de l’imprimeur, vint l’heure d’en préparer la maquette, et sa couverture.
Et d’y ajouter un logo ! Car il était hors de propos de ne pas ajouter le logo d’Artcolle à ce livre qui devait justement en représenter autant son évolution que son inscription dans le temps.
Quand le besoin de ce logo devint impérieux, j’étais alors à Plovdiv (Bulgarie) pour les besoins de l’organisation d’une exposition consacrée à l’art du collage.
Je rencontrais bien sûr, chaque jour, de rendez-vous en rendez-vous, de multiples collagistes bulgares, dont Sylvia Netcheva, qui était – en autre outre artiste – professeur d’art.
J’avais habitude de me rendre à son atelier, après ses cours. Là, soit elle travaillait sur des futures compositions, soit elle y donnait des cours privés, de peinture ou dessin, d’art du collage à partir de la pâte à papier, de tapisserie, etc.
L’idée me vint que pour cette artiste multidisciplinaire il serait assez simple de composer un logo concernant une association de collagiste.
Après moult longues soirées d’explications en franco-anglo-bulgare, je réussis à lui faire comprendre de ce dont il s’agissait, et ce que représentait exactement Artcolle . Nous conclûmes un accord. Il restait à l’artiste sept jours pour réaliser cette commande avant mon retour vers Paris. Les journées passèrent. Vint le dernier soir de ma présence à Plovdiv, et faute d’avoir eu des nouvelles de l’artiste, je décidais de me rendre à son atelier.
Bien m’en pris !
Là je compris fort vite que femme & et Bulgare à la fois, Sylvia avait oublié la commande !
Mais – me dit-elle – je vais créer cela tout de suite !
Elle découpa une grande lettre A dans un prospectus, déchira deux ou trois bouts de papier à travers quelques images, et commença à faire quelques superpositions de ces fragments.
A chaque superposition réalisée, je prenais une photographie à l’aide de mon appareil numérique, en faisant mes commentaires : – Non ça ne va pas !
– Non, c’est pas ça !
Et à chaque négation, Sylvia faisait une nouvelle superposition.
Je reçus un appel téléphonique qui mis fin à ces prémices de mouvement perpétuel cher à André Breton, et dus me rendre aussitôt à un rendez-vous (car homme et Français à la fois, ce n’est guère mieux) qui avait échappé autant à ma mémoire qu’à mon disque dur.
A mon retour, je demandais aussitôt à Sylvia où en était la réalisation du logo. Pas de chance ! Elle venait justement – en princesse d’intérieur – de mettre tous les bouts de papiers à la poubelle, juste quelques minutes avant que les éboueurs ne passent, et que moi-même je ne revienne !
Des fragments, du grand A, des superpositions : plus rien !
Hors la trace digitale de leurs furtives existences dans la carte mémoire de mon appareil photographique.
C’est l’une de ces traces, l’une de ses superpositions éphémères mais heureusement photographiées , qui est devenue le très » original » logo d’Artcolle. Ainsi, ce logo, reflet et phare de la plus grande organisation de collagistes, qui hante tous les sites et les livres d’Artcolle, n’a jamais eut le temps d’être collé, mais seulement juxtaposé avant de finir dans les déchets fumants des cendriers et des ordures ménagères.
Lui qui, représentant l’art du collage, n’a jamais eu le temps de s’y coller !
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